L'Atelier Martine Aublet par Stéphane Martin
Dans la vie du musée du quai Branly - Jacques Chirac et dans sa programmation, l’Atelier Martine Aublet occupe une place à part. Par sa situation en premier lieu, au coeur des collections. Là, en surplomb du plateau, l’endroit offre une perspective unique sur les oeuvres qu’il domine sans les écraser. Les visiteurs sont nombreux à le relever : il y a un mélange de plénitude et de légèreté à se tenir ainsi au-dessus des créations, océaniennes notamment, posant sur elles un regard qui défie les lois de la pesanteur muséale.
En cela, la physique du lieu épouse son intention. L’Atelier Martine Aublet entend en effet être un espace libre, de respiration, où les contraintes organisationnelles et calendaires du musée n’entravent pas la créativité des propositions. Les expositions montrées dans l’Atelier ont ceci de commun qu’elles ne répondent que d’elles-mêmes. Entendons par là que l’audace, la spontanéité, la surprise y sont de mise, justifiant des réalisations qui, par leur contenu et leur dimensionnement, trouvent ici un espace idoine d’expression.
On a souvent présenté le lieu comme un cabinet de curiosités. Il y a du vrai dans cette comparaison, tant s’y dit la possibilité d’une rencontre féconde entre la science et la création, la passion et la raison, l’intuition et l’inspiration. Depuis son ouverture en 2011, l’endroit n’a cessé d’accueillir des projets singuliers, décalés parfois mais toujours signifiants. Personnels aussi le plus souvent, tant la liberté du commissaire d’exposition est encouragée pour réinventer l’espace et le maintenir habité.
Les pages qui suivent donnent la mesure de l’unicité du lieu. En son sein, la métamorphose des dispositifs participe d’une même volonté d’affranchissement. La poésie ne se tient jamais très loin de cette ambition. Songeons par exemple au sublime des nuages photographiés par le comte Masanao Abe au pied du Mont Fuji, à l’explosion de formes et de couleurs orchestrée par l’artiste Hervé Di Rosa, à la découverte de l’intériorité des oeuvres par l’entremise de techniques de modélisation innovantes.
Au fil des années et des expositions, l’Atelier Martine Aublet s’est affirmé comme un lieu rare et émancipé, ouvert à l’expérience, par lequel le visiteur noue un rapport différent à la muséographie – à l’instar du commissaire et des équipes du musée, d’ailleurs. Sa programmation bénéficie du soutien constant et fidèle de la Fondation Martine Aublet. Qu’il me soit permis ici de remercier très amicalement son président, Monsieur Bruno Roger, ainsi que ses enfants.
Vif, vivant, vibrant, il était naturel que l’Atelier porte le nom de Martine Aublet. Elle m’avait soufflé l’idée d’un tel espace dans les années fondatrices de l’établissement, quand tout était encore à inventer. Ceux qui ont connu Martine savent combien l’endroit lui ressemble, elle chez qui l’audace se confondait avec l’ouverture et la curiosité – avec la générosité, tout simplement. C’est pourquoi chaque exposition qui s’y tient doit être vue, aussi, comme un hommage rendu à la mémoire de Martine Aublet, à laquelle s’attache le véritable esprit des lieux.